Mars 2006
L’édito du Goof... BIG HALL
D’habitude, quand j’entame le rituel de l’écriture de ma page pseudo-cognitive et totalo-brazilienne, je ne sais pas trop où je veux et vais en venir (oui, j’en suis conscient, il paraît que c’est assez visible à la lecture.
Je vous dirai ça le jour où... je me relirai ne serait-ce qu’un tant soit peu !), j’ouvre un document, je pars sur une vague idée ou un bout de phrase ou un simple titre, parfois ; et, hop, je dérape immanquablement de manière plus ou moins rapide et heureuse, pour finir sur complètement autre chose (quand je finis, parce que, de temps à autre, ça suinte gentiment la voie sans issue). Comme je ne me relis pas (d’où également les répétitions, c’en est une, si je ne m’abuse) et qu’il s’agit généralement d’un premier jet brut de pomme, le résultat laisse parfois (souvent ?) (toujours ?) à désirer. Bon, je suis comme tout le monde, mon méa ne coule pas. L’erreur est humaine, blablabla. Bref...
Ce mois-ci, les données sont complètement différentes. Cela fait bien dix jours que je sais très précisément ce dont j’ai envie de causer via le clavier, mais je n’y arrive pas. Zéro pointé. L’écran blanc et poussiéreux pour seule réponse à ma stérilité répétée. C’est ainsi que j’ai reporté et reporté encore l’écriture de cet édito, jour après jour, alors que, pourtant, les mots (et leurs remèdes) sont là, au bout de mes phalanges phalangines phalangettes...
Tout ceci pour en arriver à tout de suite maintenant, là quoi, avec plus trop de choix, façon alternative à tronc unique, cuisson unilatéral du Goof, because le coursier de l’imprimeur qui gratte derrière la porte, vingt-huit cafés ingurgités, ça va swinguer sur son vespa d’époque, le record Paris-Toul va sauter, je vous le dis. Il me reste deux minutes, à la louche et à (la) peine, pour vous le faire, cet édito. Alors, je vais vous le faire court (ceci dit, trois paragraphes de verbiage creux déjà dans la musette, trop malin je suis)...
J’avais donc ce titre “Big Al”, et je voulais parler d’Albert Dupontel, de son film, Enfermés Dehors, qui sort le 5 avril, de l’importance d’aller le voir et, au-delà de ça, plus globalement, de l’importance de nos actes, fussent-ils parfois prétendument isolés. Un édito culturo-écolo, en quelque sorte. Mais là, je frôle tout juste le hasardo-ramollo-ronflo-inconsistant, suis définitivement pas à la hauteur de l’œuvre dont je voulais vanter les mérites. Et, je le répète, j’insiste, oui je suis lourd je sais, il faut aller voir ce film, car c’est plus qu’un film.
D’abord, il n’a pas bénéficié des modes d’investissement courants de nos jours. Pas de chaîne de télévision par exemple pour venir saborder la chose. Même le conseil d’Ile de France a refusé son soutien financier, car le personnage principal était un SDF. Pas bien, les SDF, cracra, tout ça, faut pas montrer, mauvaise image, la France, beau pays, blablabla. Et mon cul, il a chopé la grippe aviaire ?(raccourci hasardeux, j’en conviens) ...
Donc, oui, c’est plus qu’un film. D’abord, de façon toute bête, c’est une œuvre qui peut réunir dans une même salle, et avec le même sourire s’il vous plait, les amateurs de friandises grand public et les gargantueux du cinéma d’auteur qui a des choses à dire et le dit bien. Tout ça en une heure, oui, ma bonne dame, c’est possible. Ensuite, parce qu’il y a une idée par plan, minimum, un principe cher à notre surréaliste en chef (qui joue dans le film, si si).
Et puis, surtout, c’est du ciné don quichotteste, du libre-arbitre sur péloche, de la barbe à sarkozistes, du franc parler et du beau montrer, du bien monté et du jeu de lois. Bref -et j’arrête après, question breffitude-, s’il ne devait y avoir qu’un film français à aller voir, cette année, c’est celui-ci.
D’abord parce que c’est le seul film de Dupontel réalisateur qui sortira en 2006. Ensuite, parce que le prochain Blier sortira sans doute en 2007. Enfin, parce que Gilliam n’est pas français. Et puis, aussi, parce que ne pas encourager l’homme derrière le film, le remède derrière les mots (j’y reviens), c’est tuer un peu plus tout ça. C’est laisser McDo-Total et Sarko-Karcher faire sauter la banque du Monopoly. Parce que si, dans Enfermés Dehors, les uniformes sont faux, les billets, eux, sont vrais...
Christophe Goffette
Extrait de Crossroads/Brazil (copyright).