L’exercice le plus difficile, en cette année qui démarre, est bien évidemment celui des bilans de l’année écoulée.
Il y entre, en effet, toujours une bonne part de subjectivité malgré la conscience professionnelle qui doit diriger le point de vue du chroniqueur, fût-il occasionnel.
Je me tournerai d’abord instinctivement vers ce que je connais ou que j’ai eu le plaisir de voir. Certains concerts, néanmoins, ont eu tant de retentissement que leur écho m’est parvenu jusqu’aux oreilles... Je ne manquerai donc pas de les souligner aussi.
D’une manière générale, on peut noter quatre belles organisations (au sens large) générées par Francis Géron et son équipe : le premier PEP 66 Festival (5 juin) et le week-end des Fêtes de Wallonie à Verviers (24, 25 et 26 septembre). Des réjouissances dues à la prise de risque énorme parce que permanente de notre ami Francis dans des opérations qu’on peut volontiers qualifier de réussites, principalement par la qualité de l’affiche proposée. Il en va de même pour l’Italian Prog Meeting (17 février) et la Convention ProgRésiste (9 et 10 octobre). Ces deux derniers moments, avec le podium des Fêtes de Wallonie, ayant représenté de véritables succès populaires.
Le début d’année coïncide aussi avec le nouvel horaire du Spirit Of 66 (pour rappel 21h au lieu de 22h les vendredis et samedis). Disons que le démarrage s’est fait plutôt en douceur misant principalement sur nos valeurs belgo-germano-bataves desquelles émergent instantanément les performances de O Juliette, bien de chez nous, (groupe manouche époustouflant) et de Brothers in Arms (Tribute à Dire Straits allemand irréprochable). Une mention particulière à Octarine (B) et Sharko (B).
Février nous amena le nouveau Cannon Ball en rodage et Ange en toute grande forme (mais ce ne sera rien à côté de sa performance live/open sur la Place du Martyr, en septembre), Fish énorme et Nine Below Zero incendiaire comme toujours font partie des oscars du mois. Premier accessit à Blues Rock Syndicate (Froidebise and Co) et à Yel, décidément tout terrain et bien en voix.
C’est en mars que les choses sérieuses ont véritablement commencé puisque pas moins de quatre pointures mondiales ont débarqué au Seize de la Place du Martyr avec armes et bagages pour des concerts inoubliables. Que ce soit Steve Howe (ex-Yes), Carmine Appice et Tim Bogert (recréant Vanilla Fudge), Steve Hackett (le plus gentil et le plus convaincant de tous) ou encore Andy Summers (ex-Police), ce dernier dans un registre jazzy étonnant, ils ont chacun contribué à faire de ce mois de mars 2004 un véritable feu d’artifice... Prix du public à Willy Willy (B) pour un concert surprise le 19 mars avec sa copine Beverly Jo !
Je ne pourrais, malheureusement, pas passer sous silence le dernier concert de Kevin Coyne (27 mars 2004) en nos murs, impérial comme jamais, car il nous faut désormais parler de lui au passé. La flamme de cet exceptionnel artiste s’est éteinte définitivement il y a quelques semaines. Que grâce, honneur et justice lui soit rendus, il nous a donné tant de bonheur qu’il mérite de rester en nos cœurs à jamais !
Dans un tout autre registre, avril , le mois du rire par excellence, eut l’honneur d’engendrer le dernier concert verviétois des Gauff au Suc (puisqu’ils ont mis fin à leur carrière, en mai). Inutile de vous décrire l’ambiance : le tonnerre, la foudre et la rigolade atomiques !!! Salut amical à nos gugusses qui ont bien mérité du raâââkkkk ène rôôôôlll !!!
Mais ce n’est pas tout. Petite révélation dans le monde du blues : Jim Suhler fin et noble, nous a montré l’étendue du blues des marais à l’image des grands comme John Fogerty ou Tony Joe White.
- Beverly Jo Scott
- Beverly Jo Scott
Beverly Jo Scott a littéralement allumé le great sounding club un certain 9 avril qui fera date. On attend toujours son DVD et son nouveau CD réalisés pour partie à Verviers. J’ajouterai une grande distinction au show de Roland Van Campenhout (son dernier CD Lime and Coconut étonnant et quelques magiques reprises...), un premier accessit à Jan Akkerman (pro jusqu’au bout des ongles malgré la faible assistance) et une mention toute spéciale à mes potes de D Majiria pour leur métal dopant ainsi qu’à Triggerfinger (et Lange Paul survolté) pour avoir fait reculer les limites du son à l’infini.
Mai , mai, joli mai... La chanson va bien au Spirit Of 66 qui nous offre un bouquet de 19 concerts, pas moins !... Les Nineties Buddies ouvrent magistralement le feu le jour de la Fête du Travail (bon boulot, les gars , les filles...). Retour du sage et sympathique Carl Verheyen juste avant la bombe de Skew Siskin (Lady Bon Scott), une des trois révélations de l’année, au rock juteux et épicé ne manquant pas de punch, en un mot : a...do...ra...ble !
Un grand concert de Junior Watson, à la fois intimiste en première partie et hyper-rock en deuxième. Nouveau passage remarqué de Leslie West (sans Mountain) pour du blues pur jus et, me confiera Francis Géron, pour la meilleure version, jamais entendue en ces lieux, de « House of The Rising Sun ». Au rang des bons petits belges, saluons Ken’s Novel et Girls In Hawaï qui confirment, ainsi que Slang (spécial et difficile mais tellement intense) et l’incroyable Fred and The Healers passé deux fois cette année dans des formules toutes plus roboratives les unes que les autres. Je n’oublierai évidemment pas Larry Coryell et son trio magnifique ainsi que Walter Trout et ses soli de guitare étincelants..
L’été et ses grosses chaleurs se sont annoncés en juin un rien plus tôt que prévu avec Ian Hunter et Mick Ralphs entourés de pointures dignes d’un All Stars band. C’est assurément un des tout grands concerts de l’année même s’il fut un peu chiche question rappels. Je ne pourrai à nouveau pas passer sous silence la performance de Dr Feelgood, tête d’affiche du PEP 66. Je me jure bien de les revoir à la première occasion pour un papier enflammé, ça c’est sûr. Pat Travers, Iron Butterfly et les Paladins (surtout) m’ont réellement impressionné. Ce qu’il y a d’époustouflant avec ces derniers, c’est qu’ils enchaînent dix à douze titres comme des bombes avant de respirer. C’est tout bonnement incroyable.
Juillet malgré la torpeur ambiante et la démobilisation générale nous a toutefois valu deux moments US inespérés, de la meilleure veine. Le merveilleux concert de Jenny Kerr (country-rock d’amour...) le 3 juillet et le feu d’artifice d’American Dog (rock and roll destroy) le 13. Ma dernière montée en front de scène, en quelque sorte... Surprise, surprise, le dernier week-end du mois d’août a subrepticement ravivé la flamme du rock and roll dans une nuit (27) Woodstock de derrière les fagots (joke) avec Roadhouse. Le 30 c’est de véritable embrasement qu’on peut parler vu la prestation bouillante et combien vitaminée de Pat Savage Band.
J’ai vu, en septembre , la ènième (je ne les compte plus) apparition de Jean-Pierre Froidebise, sans doute l’un des recordmen de passages au Spirit, toujours en verve et accompagné d’amis pour son live made in Verviers. J’ai apprécié les Seatsniffers d’un côté et Red Rivers de l’autre, mais pas trop les deux ensemble. Je reste convaincu qu’Eddie Martin (UK) n’a pas le succès qu’il mérite. Ce gars pratique le blues comme nous on respire, il lui donne une coloration chaude et belle qui sublime ses mélodies (parce qu’il compose plein de petites merveilles, le bougre...). Je pose Iona comme grand moment de musique celtique, je retiens Lana Lane ainsi que son ombre Erik Norlander tels des artistes irréprochables et j’ajoute une pincée d’Alabama Thunderpussy pour l’impertinence, voilà qui nous a valu une fin de mois gratinée le long de la Vesdre.
Il nous reste un trimestre à parcourir, je sais que je vais encore me faire sonner les cloches par le rédac’ chef mais comme je suis chargé de la défense des chefs-d’œuvres en péril, je trace imperturbablement...
Maljean et Stotzem, en octobre la même semaine au Spirit, avouez quand même que ça a de la gueule, non ? De grands artistes de chez nous qui méritent une reconnaissance éternelle... pourquoi pas un jour ensemble au SEIZE ? J’associe The Blues Band, Poppa Chubby (sold out surprenant mais combien réconfortant), Pat Travers, Carmine Appice (encore) et Ray Wilson dans le même hommage. Ils montrent que même lorsqu’on est star on peut rester humain et je fais le pont en lançant un grand salut amical à nos jeunes artistes en plein essor tels que Auguste Kirpan, Géraldine Cozier, Alexis et Eté 67 (récent vainqueur du tremplin Franco 2004) qui, chacun dans leur style, ont occupé la scène du Spirit Of 66 avec aplomb et conviction. Une chose encore : Jeff Scott Soto a donné son meilleur concert depuis qu’il vient chez nous. Adorable bonhomme, s’il en est...
- The Pretty Things
- The Pretty Things
Novembre fut marqué par une kyrielle d’événements majeurs, tels le quarantième anniversaire des Pretty Things, l’explosion bretonne de E.V. et son accordéon en folie (salut fakir !), l’imparable prestation de Beverly Jo Scott convertie en Janis Joplin plus vraie que nature et l’extraordinaire virtuosité de Lucky Peterson, un must dans le genre dont la venue à Verviers représentait déjà un rêve éveillé...
Je retiendrai pour décembre , deux étonnantes et véritables découvertes de Francis Géron : Martin Gerschwitz et Ryo Okumoto (rock et prog’ même combat) malheureusement pas des succès de foule, la vitalité retrouvée de Irish Coffee, le deuxième passage de Cannon Ball quasi sold-out (ça fait plaisir), la prestation remarquée de Christophe Celen, la grande nuit de folie Soundshake avec Parking Loft, Hojo, Gog of Magog et Spoiled et enfin, last but not least, le tribute à Jim Morrison des BackDoors tout droit venus d’Irlande, hyper rock et très convaincants dans leur rôle de successeur de L.A. Doors (aujourd’hui définitivement à l’arrêt).
Que dire pour terminer ce papier ? D’abord vous souhaiter les meilleurs vœux de toute l’équipe du Spirit Of 66, vous espérer nombreux, bien sûr, en 2005 (entre autres pour le Festival de la Guitare co-programmé par le Spirit et Jacques Stotzem à l’espace Duesberg et Place du Martyr...) et soutenir encore et toujours l’extraordinaire travail que réalise Francis Géron, le tributeman le plus génial du rock and roll !
Didier DIRIX
© Texte : Didier Dirix - © Photos : Patfraca
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